René Guénon : « Une des figures les plus curieuses de cette Maçonnerie « irrégulière » fut l’Anglais John Yarker, qui […] soutenait, entre autres opinions bizarres, que « le Maçon initié est prêtre de toutes les religions » . » Représenté par Reuss auprès de Steiner, ami de Mazzini, de Garibaldi, membre de l’Ordre Martiniste et de la Societas Rosicruciana in Anglia, fait membre d’honneur par Mme Blavatsky elle-même de la Société Théosophique, John refonda les rites Memphis-Misraïm (genre égyptien) ou de Swedenborg (appelé New Jerusalem Church, « église » où figurait un certain Colonel Olcott en Inde). Un vrai noachite en somme…

John Yarker (17 avril 1833 – 20 mars 1913) était un franc-maçon anglais, un occultiste et un auteur d’ouvrages maçonniques et occultistes.
Memphis et Misraïm
Le 8 octobre 1872, Harry J. Seymour, le Grand Maître de Memphis aux États-Unis, établit à Londres un Souverain Sanctuaire du Rite Ancien et Primitif pour la Grande-Bretagne et l’Irlande. John Yarker en devint le premier Grand Maître Général. Harry Seymour transmit aussi à John Yarker d’autres Rites, en particulier le Rite Écossais de Cerneau qui plus tard fut absorbé par le Rite de Memphis. En 1876, John Yarker incorpora également dans ce Rite Ancien et Primitif le Rite de Misraïm que Robert Wentworth Little1 avait introduit en Angleterre en 1870. En 1881, Yarker parvint à obtenir une charte du Rite Réformé de Misraïm de Pessina (qui comportaient 33 degrés) en échange d’une charte de Memphis. Cela se passa au moment même où le général Joseph Garibaldi était nommé Grand Hiérophante général des deux Rites. Cela consacra officiellement la fusion des Rites de Memphis et Misraïm.
Peu à peu le Rite fut porté à 97 degrés et s’appela réellement Rite de Memphis et Misraïm. En 1913, après nombre de péripéties,John Yarker en devint jusqu’à sa mort en 1913 le Grand Hiérophante pour tous les pays d’Europe. Yarker était un ami d’Helena Petrovna Blavatsky et de Joseph Garibaldi et il semble bien qu’il soit pour quelque chose dans la fondation de la Société théosophique. Après que Mme Blavatsky eut publié son ouvrage « Isis dévoilée », il la reçut dans sa Franc-maçonnerie à hauts grades et lui conféra le suprême grade d’adoption. Elle négocia avec Yarker l’introduction d’un rituel dans l’école ésotérique de la Société théosophique, mais cela resta sans suite.
Yarker et Papus
En 1901, Papus obtint de John Yarker une patente pour ouvrir à Paris la loge INRI travaillant selon le Rite Swedenborgien. La Loge INRI devint ultérieurement le siège de la Grande Loge Swedenborgienne de France grâce à une nouvelle charte reçue de John Yarker le 20 mars 1906.
Yarker et Rudolf Steiner
En 1906, Rudolf Steiner reçut de Theodor Reuss2, qui représentait Yarker en Allemagne, un patente pour fonder à Berlin un Chapitre et Grand Conseil de Memphis-Misraïm sous le titre distinctif de « Mystica Aeterna ». Steiner fut appointé Député Grand Maître avec juridiction sur les membres qu’il avait reçu où qu’il recevrait dans le futur3. Steiner entra assez vite en conflit avec Reuss et reprit son indépendance. Puis à partir des éléments initiatiques qu’il avait rassemblés, il fonda son propre Rite la « Franc-maçonnerie ésotérique », à laquelle Edouard Schuré aurait probablement été initié. Ce Rite se servait d’un rituel fort ancien, dont le texte se trouve partiellement dans l’ouvrage « Dogme et Rituel de Haute Magie » d’Éliphas Lévi. Dans son autobiographie, Steiner minimise les rapports qu’il a eu avec la Maçonnerie et Reuss en particulier. À noter que Theodor Reuss était un ancien membre de la Société théosophique. Selon certains auteurs4, Steiner aurait aussi été initié dans l’Ordre de la Rose-Croix Ésotérique de Franz Hartmann5, un autre théosophe et ami de Reuss, qui après l’affaire Judge6, avait fondé une branche dissidente de la Société théosophique en Allemagne.
Selon René Guénon [Le Théosophisme – Histoire d’une pseudo-religion]
Chapitre III – La Société Théosophique et le Rosicrucianisme