Le mari de Moïna Bergson Mathers – soeur du philosophe – fût le co-fondateur de la Golden Dawn et y initia le tristement célèbre Alesteir Crowley. Compte tenu de ses « influences familiales positives » et de « ses » concepts tels que « L’Evolution Créatrice » (1907) ou de Société Ouverte (développé dans « Les Deux Sources de la morale et de la religion » en 1932 et repris par Popper), on peut se demander si Henri Bergson – malgré un prix Nobel en 1927 – n’était pas surtout un beau-frère idéal pour évangéliser !
Biographie
Samuel Liddell Mathers était le fils de William M. Mathers, un employé de commerce et de son épouse Mary Ann Collins. Son père décéda alors que Samuel Liddell n’était encore qu’un enfant et élève à la Bedford School où il étudia de 1866 à 1870. Il alla ensuite vivre avec sa mère à Bornemouth où il trouva un emploi de bureau qui lui laissa le temps d’étudier la magie et la doctrine militaire. Ses intérêts militaires lui firent rejoindre un régiment local de volontaires et se mettre à la boxe et à l’escrime. Il n’hésitait alors pas à aider les autorités à ramener l’ordre en cas de troubles. Il publia en 1884 une traduction d’un manuel d’exercices de l’armée française (Practical Instruction in Infantry Campaigning Exercise) .
Un voisin, ami et franc-maçon, Frederick Holland guida ses premières études magiques. Mathers devint maçon le 4 octobre 1877 et il adhéra en 1882 à la Societas Rosicruciana in Anglia avec Holland. Là, il rencontra William Wynn Wescott . Le 20 janvier 1878, il devint Maître Maçon et devint aussi rapidement membre du Haut Conseil de la S.R.I.A. pour quatre ans.
À la mort de sa mère en janvier 1885, il s’installa à Londres et devint plus actif dans les milieux occultistes. Il travailla ainsi avec Westcott à développer ce qui serait plus tard la base des rituels de la Golden Dawn . En 1886, il participa aux travaux de l’Hermetic Society d’Anna Kingsford . En 1887, il traduisit en anglais la Kabbala denudata de Knorr von Rosenroth, sous le titre : Kabbalah unveiled. En mars 1888, associé à William Robert Woodman et William Wynn Wescott, deux de ses collègues francs-maçons de la S.R.I.A., il fonda la Golden Dawn. Une des premières initiées fut Moina Bergson , la sœur du philosophe Henri Bergson. Avec celle-ci, MacGregor Mathers développa l’ordre Rosae Rubeae et Aureae Crucis . Il fut également le mentor d’Aleister Crowley dans la Golden Dawn.
Le couple Mathers était assez pauvre et vivait mal des publications diverses (sur le tarot par exemple) de MacGregor Mathers. L’aide financière d’Annie Horniman, une amie fortunée de Moina et membre de la Golden Dawn fut la bienvenue : elle lui trouva un emploi dans le musée privé créé par son père et versa une pension au couple, même après leur installation à Paris en mai 1892. Là, il créa l’Ahathoor Temple of the Golden Dawn puis les Rites of Isis .
Samuel Liddell MacGregor Mathers était considéré comme d’un caractère difficile et comme ayant la « folie des grandeurs ». Il ajouta dès 1878 « MacGregor » à son nom et se déclara « comte de Glenstrae ». Il existe des photos de lui jeune homme en uniforme de lieutenant de son régiment, alors qu’il ne devint jamais officier. Il n’aurait pas non plus supporté de perdre. Ainsi, il aurait rejeté un impétrant à la Golden Dawn car celui-ci l’aurait défait lors d’une rencontre d’escrime. Il aurait rompu avec Holland puis avec Wescott lorsqu’il aurait découvert qu’ils étaient de meilleurs érudits magiques que lui. Il réussit à faire exclure Wescott de l’ordre de la Golden Dawn, avant de faire de même avec Annie Horniman après qu’elle lui eut retiré sa pension en 1896. En 1900, il écrivit à Florence Farr que Wescott avait créé de toutes pièces des documents lors de la création de la Golden Dawn. Le conflit dégénéra lorsqu’il ne put apporter de preuves. Il envoya Aleister Crowley reprendre possession des locaux londoniens et en exclure les « rebelles ». L’inverse se produisit : MacGregor Mathers fut exclu de l’ordre .
Il emménagea chez un couple d’escrocs, les Horos. Leur procès en 1901 discrédita fortement la Golden Dawn
.Mathers était un individu excentrique qui avait opté pour un style de vie pour le moins inhabituel à son époque. Il compléta son nom de famille avec le patronyme MacGregor pour revendiquer son héritage des Hautes-Terres d’Écosse. Il était végétarien (ou peut-être végétalien), anti-vivisectionniste déclaré, et non-fumeur. Il était également un partisan des droits de la femme et était peu intéressé par l’argent .
Mathers savait lire et traduire nombre de langues, parmi lesquelles l’anglais, le français, le latin, le grec ancien, l’hébreu, le gaélique et le copte.
Mathers mourut le 20 novembre 1918. La cause de sa mort est inconnue, non mentionnée sur son certificat de décès. Violet Firth (Dion Fortune) avança que sa mort était due à la grippe espagnole de 1918.
Selon René Guénon [Le Théosophisme – Histoire d’une pseudo-religion]
Chapitre III – La Société Théosophique et le Rosicrucianisme
En 1876, Olcott écrit à Stainton Moses qu’il est « régulièrement inscrit comme novice dans la Fraternité », qu’il a été « longtemps en relations personnelles par correspondance » avec les chefs de celle-ci, et qu’ils lui ont « écrit certaines choses que Mme Blavatsky ne soupçonne même pas qu’il sait ». De quelle « Fraternité » s’agit-il ? Ce n’est sûrement pas la H. B. of L., et ce ne doit pas être non plus l’Arya Samâj, avec lequel, d’ailleurs, l’alliance définitive ne devait être conclue que l’année suivante ; quant à la fameuse « Grande Loge Blanche » ou « Fraternité du Thibet », il n’en était pas encore question, mais les termes employés étaient assez vagues pour autoriser toutes les confusions ultérieures, volontaires ou involontaires. Dans une autre lettre adressée un peu plus tard au même correspondant, et de laquelle il semble résulter que celui-ci avait accepté d’entrer dans la société à laquelle Olcott appartenait, on lit ceci : « Je désire que vous demandiez à Imperator, en lui présentant mes compliments, s’il ne pourrait pas faire quelque chose, à la manière psychologique (sic), pour empêcher Mme Blavatsky d’aller dans l’Inde. Je suis très inquiet sur ce point ; je ne puis rien faire moi-même… Les calomnies qui ont circulé en Europe et ici l’ont abattue si profondément… que j’ai peur que nous ne la perdions. Ceci peut être une petite chose pour les spiritualistes, mais c’en est une grande pour nous trois… Demandez à Imperator ce que je suggère… Il semble être un esprit sage, et peut-être en est-il un puissant. Demandez-lui s’il peut et s’il veut nous aider… Il y a ici une Mme Thompson, une veuve riche de sept millions (de dollars), qui cultive le terrain sur lequel marche Mme Blavatsky. Cette dame lui offre argent et tout ce qui s’ensuit pour aller dans l’Inde et lui fournir ainsi une occasion d’étudier et de voir par elle-même… N’oubliez pas Imperator. (*) » Mme Blavatsky n’était donc jamais allée dans l’Inde avant son séjour en Amérique, nous en avons cette fois l’assurance formelle ; mais elle désirait y aller, parce qu’elle éprouvait le besoin « d’étudier et de voir par elle-même », ce qui prouve qu’elle n’était pas très « initiée » et qu’elle n’était pas encore arrivée à posséder un ensemble de convictions bien fixes et bien établies. Seulement, il y avait alors une influence dont Olcott et Stainton Moses se faisaient les agents, et qui était opposée à ce départ de Mme Blavatsky pour l’Inde ; ce n’était donc pas l’influence de l’Arya Samâj, ni d’aucune autre organisation orientale.
Maintenant, pourquoi Olcott dit-il : «pour nous trois»? Lui et son correspondant, cela ne fait que deux ; le troisième semble bien n’être autre que cet Imperator dont il réclame l’appui avec tant d’insistance ; mais qui était cet être mystérieux ? C’était, paraît-il, un « esprit » qui se manifestait dans le cercle dirigé par Stainton Moses et son ami le Dr Speer ; mais ce qui est étrange, et ce qui peut donner la clef de bien des choses, c’est que cet « esprit » se soit attribué le nom ou plutôt le titre d’Imperator, qui est celui du chef d’une société secrète anglaise, l’Order of the Golden Dawn in the Outer (littéralement « Ordre de l’Aube d’Or à l’Extérieur »).
L’Ordre que nous venons de nommer se présente comme une « société d’occultistes étudiant la plus haute magie pratique », et qui « marche en quelque sorte parallèlement au vrai Rosicrucianisme » ; les femmes y sont admises au même titre que les hommes, et la qualité de membre demeure cachée. Il y a trois officiers principaux : l’Imperator, le Præmonstrator et le Cancellarius. Ce même Ordre est étroitement rattaché à la Societas Rosicruciana in Anglia, fondée en 1867 par Robert Wentworth Little ; celle-ci comprend neuf grades, répartis en trois ordres ; ses chefs, qui sont au nombre de trois comme ceux de la Golden Dawn, portent le titre de Mages (1). La Societas Rosicruciana n’admet que des Maçons possédant le grade de Maître parmi ses membres dont le nombre est limité à cent quarante-quatre, non compris les membres honoraires ; elle possède quatre « Collèges », qui sont établis à Londres, York, Bristol et Manchester. Une organisation similaire existe en Écosse depuis 1877, et une autre branche fut constituée en Amérique eu 1880 ; ce sont deux filiales de la société anglaise, dont elles sont cependant administrativement indépendantes.
Dans une lettre adressée au directeur de la revue théosophique Lucifer, en juillet 1889, par le comte Mac-Gregor Mathers, qui était alors secrétaire du Collège Métropolitain de la Societas Rosicruciana et membre du Haut Conseil d’Angleterre, il est dit entre autres choses : « Cette Société étudie la tradition occidentale… Des connaissances de pratique sont le privilège des plus hauts initiés, qui les tiennent secrètes ; tous les Frères tiennent secret leur grade. La Société Théosophique est en relations d’amitié avec eux… Les étudiants hermétiques de la G. D. (Golden Dawn) Rosicrucienne en sont, pour ainsi dire, les représentants à l’extérieur. » La publication de cette sorte de manifeste avait pour but principal de désavouer un certain « Ordre de la Rosée et de la Lumière » (Ordo Roris et Lucis), autre société anglaise soi-disant rosicrucienne, dont il avait été question précédemment dans la même revue (2) ; cette dernière société se trouvait en concurrence directe avec la Golden Dawn et la Societas Rosicruciana et ses membres, qui étaient spirites pour la plupart, étaient accusés de faire de la « magie noire», suivant une habitude qui est d’ailleurs fort répandue dans les milieux théosophistes, ainsi que nous aurons l’occasion de le voir plus tard. La lettre du comte Mac-Gregor porte les devises suivantes : « Sapiens dominabitur astris.— Deo duce comite ferro. —Non omnis moriar.— Vincit omnia veritas » dont la dernière, chose curieuse, est également la devise de la H. B. of L., adversaire déclarée de la Société Théosophique et de la Societas Rosicruciana (1). Elle se termine par ces mots qui lui confèrent un caractère officiel : «Publié par ordre du Supérieur Sapere Aude Cancellarius in Londinense », et que suit ce post-scriptum assez énigmatique : « Sept adeptes qui possèdent l’élixir de longue vie, vivent actuellement et se réunissent chaque année dans une ville différente. » L’Imperator de la G. D. était-il l’un de ces « sept adeptes » mystérieux ? C’est bien possible, et il y a même pour nous d’autres indices qui semblent le confirmer ; mais sans doute le « Supérieur Sapere Aude » n’avait-il pas autorisé de révélations plus explicites à cet égard (2).
Voir également Les postérités de la théosophie du théosophisme au New Age de Politica Hermetica